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novembre 2020

Le livre Presse

Le Soir

26 novembre 2020

Trois auteurs et deux autrices forment le quinté du Prix Rossel

Trois livres édités en Belgique parmi les cinq œuvres nominées au Prix Rossel de littérature. Cette première confirme que nos éditeurs ont du nez quand il s’agit de humer les talents.

Mardi soir, la rue Royale dormait, éteinte par une pandémie tenace. Personne n’avait imaginé ce scénario noir pour l’édition 2020 du Prix Rossel. Par mesure de précaution sanitaire, le jury ne pouvait pas se réunir : une première depuis la Seconde Guerre mondiale. Mais là où le regard ne portait pas, aux domiciles des jurés confinés, Zoom a permis aux grands esprits de se rencontrer par écrans interposés.

« On ne va pas pouvoir casser la gueule à nos contradicteurs », ricanait Jean-Luc Outers, toujours prompt à en découdre dans la joie et la jubilation. « Je me sens comme un homme invisible, j’ai l’impression d’être aveugle », s’inquiétait Michel Lambert, aux yeux de qui l’invraisemblable touchait soudain au vraisemblable. Il montrera au fil des quatre heures de débats qu’il n’avait rien perdu de son esprit critique en route. Client farouche des nouvelles technologies, le président, Pierre Mertens, s’est finalement réjoui de « la fraternité » de ces retrouvailles virtuelles.

Pour Hedwige Jeanmart et Caroline De Mulder, les deux nouvelles recrues du jury, le baptême du feu s’annonçait déroutant. « J’aime énormément partager autour d’une table et j’avais prévu d’apporter du saucisson catalan », confessera Hedwige Jeanmart, depuis son appartement de Barcelone. « Mais la soirée a été super motivante et très enthousiasmante. » « J’ai hésité à accepter de participer », précisera Caroline De Mulder. « J’aurais tellement aimé discuter autour d’une table moi aussi. C’est très frustrant pour une première. Je n’ai cependant aucun regret. J’ai fait d’agréable découvertes. Il y a énormément de livres qui forcent l’envie d’être lus jusqu’au bout dans cette sélection du Rossel 2020. »

A défaut de pouvoir partager le couvert et le verre, le jury s’est entendu pour souligner la qualité « époustouflante » de ce cru 2020. Au terme d’un premier tour de table marqué au fer des joutes musclées sur la justesse de la pensée, la maîtrise du style, la capacité à surprendre, 21 titres ont émergé. Un second round a permis de resserrer les choix autour de 11 romans magnifiques de talent. Il en faudra un troisième pour cerner les éblouissements.

En dépit de leur profondeur et de leur écriture singulière, Consoler Schubert de Sandrine Willems, La carte des regrets de Nathalie Skowronek, On ne coupe pas des ailes aux anges de Claude Donnay, Venus Poetica de Lisette Lombé, Le pub d’Enfield Road de Rossano Rossi et Ça va n’aller de Mol Pieterke ne feront pas partie du quinté des nominés à découvrir ci-contre. Par ailleurs, le jury a souligné sa fierté de voir que trois des cinq livres nominés sont édités en Belgique : La Confiture de morts chez Weyrich, Judas côté jardin et Cent jours sans Lily chez Onlit.

Article par Daniel Couvreur disponible dans Le Soir du 26 novembre 2020.
Article numérique disponible ici.

Presse

La Libre

25 novembre 2020

Voici un récit qui n’épargne personne (ni la narratrice ni son entourage) et qui décrit sans ambages les ravages de l’alcool. L’alcool au quotidien – pas le mondain. Celui d’une mère, d’un père, d’un beau-père et, aussi, celui d’une jeune fille. Pour raconter cette plongée dans une famille alcoolique borderline (la sienne, en fait), Pieterke Mol emprunte la forme d’un journal, écrit à la 1re personne mais aussi à la 2e, quand l’héroïne parle de sa mère. Un regard lucide, qui vibre d’un amour filial, tout en faisant état de ses limites et de l’impuissance qu’elle ressent. “Tu as besoin qu’on te câline et qu’on te berce. Tu es si fragile. Mais je ne peux pas être cette personne. Je voudrais être ta mère pour t’aimer très fort et te le dire comme je respire.” Son salut, l’autrice le trouvera lors d’un voyage en Australie (qui est presque un autre récit à lui tout seul). Dans la photographie (son travail de fin d’études porte sur son père – pour lequel un des ses profs lui avait demandé : tu l’as rencontré où ce SDF?) Et dans l’écriture qu’elle appréhende dans un style réaliste qui emporte le lecteur ou la lectrice grâce à son rythme (des phrases courtes et abruptes s’enchaînant dans une course effrénée à la (sur)vie). M.-A.G.

Article par Marie-Anne Georges disponible dans La Libre du 25 novembre 2020.

Les photos poèmes

Tes mots

20 novembre 2020

Tu me parles et je te regarde sans te voir.
Yeux épars collés dans le rien.
Symbole des alcools qu’on ne distingue plus.
Tes mains sur mes épaules qui les secouent.
Et moi qui te regarde sans te voir.
Tes mots, je le sais, sortent de ta bouche pour me heurter.
Comme on percute un passant que l’on n’aurait pas vu arriver.
Mais tes mots, tes mots.
Ils ne me font plus rien.
Je les écoute sans les entendre.
Et c’est la musique des chansons trop courtes qui s’essoufflent dans le silence.
Dans tes yeux. Dans ta bouche.
Mon souffle coupé et les oiseaux qui chantent.

Le livre Presse

Axelle magazine

2 novembre 2020

Se lancer dans l’écriture d’un récit autobiographique: un acte de foi en soi- même, celui qu’a posé Pieterke mol, jeune autrice bruxelloise, avant d’assurer la publication de son texte par financement participatif.

Titre de ce premier roman, Ça va n’aller. Un titre instable, le petit «n’» de la négation venant perturber la déclaration d’intention, ça va aller/ça n’ira pas, mais on avance de toute façon. et rien d’autre à faire dans le quotidien d’une famille d’alcooliques, père, beau-père, mère, chacun·e à son tempo, chacun·e à sa façon.

Un récit autobiographique sur l’assuétude, les pertes, qui n’amenuisent pas l’amour. au centre, celui d’une mère pour sa fille, d’une fille pour sa mère, même quand les rôles s’inversent. Alcoolisme par transmission pourrait-on dire, traversée de culpabilité, de sentiment d’insuffisance…, vivre avec ce vide intérieur à remplir d’autre chose que de bibine. Comment se construire quand les parents, la famille défaillent, vin et sang mêlés comme sur la photo de couverture illustrant la première scène du livre.

Hachée, âpre, dure, envoûtante aussi, et poétique souvent, l’écriture – question de survie, confie Pieterke mol sur son site – n’est pas que thérapeutique. L’écriture partage, touche à l’intime et reste pudique, mais ce n’est pas uniquement là que réside son intérêt: le texte possède une réelle puissance littéraire, moments en apnée, le lecteur, la lectrice happé·es dans le monde de ce « je » tiraillé, auquel l’autrice essaie de donner sens pour s’approprier ce qui a été subi, le transformer et se montrer, elle, qui s’est toujours laissé absorber par les autres. (V.L.)

Chronique par Véronique Laurent disponible dans le Axelle magazine du mois de novembre 2020.
Pour le commander, rendez-vous ici.